J'ai lu "voyage à Pitchipoï" de
Jean-Claude Moscovici, qui est une autobiographie -plus précisément un
témoignage. L'auteur, d'origine juive, relate son histoire durant la Seconde Guerre
Mondiale.
Il a été publié par l'école des loisirs en
1995. J-C. Moscovici fut déporté dès l'âge de six ans avec sa petite soeur qui,
elle, n'en avait que deux. Il est né à Paris en 1936 mais il est d'origine
roumaine. Son père est arrivé en France en compagnie de ses deux autres frères.
Il était médecin et aimé par tout le village. Mais en 1940, avec l'occupation,
leur quotidien va changer. Ephraïm -le père du petit Jean-Claude Moscovici-
doit arrêter sa profession de médecin du fait des lois anti-juifs.
Dans la nuit du 15 au 16 juillet 1942, son père et ses deux
oncles sont arrêtés puis déportés à Auschwitz par le convoi n°8. Le premier
septembre, sa mère fausse compagnie aux autorités allemandes grâce à sa voisine
-et amie- Odette Blanchet.
Puis c'est au tour de Jean-Claude et Liliane
(qui ont, rappelons-le, six et deux ans) de se faire arrêter le 9 Octobre 1942
et qui sont envoyés d'abord dans une prison, puis dans le camp de Drancy où ils
sont sous-alimentés.
Ils vont réussir à s'en sortir grâce à un de
leurs oncles qui était lui aussi interné là-bas et qui arrivera à les placer
dans un orphelinat, avant qu'ils ne puissent retrouver leur mère en janvier
1943.
Commençons par le commencement : le titre.
En effet, "Pitchipoï" est un nom quand même étrange, non ? En fait,
c'est le nom qu'utilisaient les juifs de France pour désigner le lieu inconnu
et menaçant des convois des déportés. Il serait apparement apparu à Drancy
parmi les enfants qui y étaient retenus. Cela signifie "pays de nulle
part". C'est l'équivalent de notre "Trifouillis-les-Oies" ou encore "Pétaouchnok"en quelque sorte.
Jusqu'a la page 41, il parle en résumé de sa
vie. Mais à partir de la page 42, il décrit l'arrestation de sa famille par les
allemands. Cet évènement l'a particulièrement frappé puisqu'il s'en souvient en
détail ; jusqu'à la date exacte "c'était dans la nuit du 1er au
2 septembre". C'est d'ailleurs l'un des seuls moments qu'il décrit avec
précision. Il se rappelle presque tout. Du comment il a été réveillé, où ils
étaient cachés -lui et sa soeur. Il se rappelle même que sa mère les a mis sous
un vieux tapis du grenier après avoir rabattu les couvertures de leurs lits
comme si personne n'y avait dormi. Malgré son très jeune âge, il comprenait
plus ou moins ce qu'il se passait. Il a essayé de retranscrire au plus vrai
possible son passé.
Dans le reste du livre, les évènements sont
confus, un peu en désordre et vagues. Il passe de son histoire à celle de sa
mère et pas forcément chronologiquement ou de façon qu'on voit le
rapprochement. La plume qui a écrit n'est pas non plus superbe. Il parle sans
vraiment décrire, il n'apporte pas grand chose de nouveau. Au camp de Drancy il
change de point de vue, il utilise le pronom "on" (peut être pour
inclure sa soeur avec qui il est resté durant tout le temps de la guerre ? Ou
pour se mettre à la place de tous les enfants du camp...?).
On peut relever tous les mauvais points de
cette autobiographie, mais on peut aussi les voir sous un autre angle. Il doit
supporter la douleur de ses souvenirs dans un livre alors qu'il ne sait pas
forcément très bien manier la plume mais pourtant, il s'efforce, malgré tout, à
se donner au maximum afin que son histoire soit publiée. Ce qui est assez
touchant, car beaucoup n'ont pas eu ni la force, ni le courage de le faire, par
peur de retomber dans leurs cauchemars, dans leur calvaire maintenant passé
mais pourtant bien ancré dans leur mémoire... Alors oui, ce n'est pas forcément
un chef d'oeuvre, mais ça vaut le coup d'oeil. Car ce n'est pas une grande
oeuvre littéraire mais cela reste tout de même un témoignage fort sur cette
période sombre de l'histoire de l'Histoire.
Guillemette Jimenez
2 commentaires:
Excellente analyse, vous avez parfaitement compris le message véhiculé par cette oeuvre. Je trouve étonnant qu'un collégien ait ce niveau d'analyse. Félicitations, j’espère pouvoir lire vos autres articles dans le futur.
Pour avoir rencontré l'auteur, je peux vous dire qu'il s'agit quelqu'un de très lettré et qui écrit très bien. "Voyage à Pitchipoï" use d'un style DÉLIBÉRÉMENT simplifié et pudique et la critique du style est, pour ce genre d'ouvrages, hors de propos. Pour le cas de Jean Claude Moscovici, deux raisons l'ont fait opter pour ce style, d'abord il s'adresse à des enfants, ou à des très jeunes gens, ensuite il tente de retranscrire des souvenirs au travers des yeux de l'enfant qu'il a été. C'est selon moi un point manquant à votre analyse et la raison d'un contresens.
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